jeudi 12 juin 2014

Rêves de chimères

Et le pire, c'est que je n'ai pas mangé de la journée...
 
 
"Oh, on dirait des vrais!"
 
L'un des formateurs tâte mes macarons, tout juste sortis du four. Je ne suis pas peu fière et maman, surtout, le serait. Je crois que cette fois, j'ai bel et bien dompté la douille et si je n'ignore pas tout le chemin qu'il me reste à parcourir, je me dis que c'est déjà ça de gagné.
 
Au centre de formation, dans la chaleur de la cuisine, les journées sont parfois longues, mais sincèrement, j'adore. Aujourd'hui, je me suis retrouvée toute seule dans ce dédale d'inox. Les futurs diplômés (c'est tout le mal que je leur souhaite) avaient terminé leur examen blanc, rangé la batterie, passé le jet. D'autres suivaient un cours sur l'hygiène. Et moi, j'étais là, entre mes derniers trucs à fignoler, prenant sans doute trop de temps pour cela, mais je me sentais bien.
 
Le chef m'avait demandé des macarons au café et ils avaient une belle tête. Bon, il me restait des feuilletés au pavot à enfourner, des tomates à couper - à l'arrache, et plus en mirepoix. Ben oui, il était 17 heures et je n'étais pas au bout de mes peines. Alors, le mirepoix, hein...
 
"Tu veux un lit de camp?", m'a demandé JP, l'un de mes acolytes, bien plus avancé que moi dans son parcours de cuistot, mais toujours prévenant.
 
Et de se tourner vers le chef : "Stéphanie, elle est tellement contente d'avoir sa cuisine pour elle toute seule qu'on ne l'arrête plus!"
 
C'est vrai. Un pied dans la réalité, l'autre la tête dans les nuages, à imaginer des lendemains enjoués. Finalement, cette formation, si concrète soit-elle, me plonge totalement dans mes rêves, que je peux vivre librement. Ce sentiment très fort me fait oublier, je crois, la fatigue et les difficultés passagères (mince, j'ai l'impression de réciter une pub pour un médoc). On me permet d'apprendre, de laisser parler ma candeur, sans jugement.
 
J'ai l'impression d'avoir laissé ma part d'enfant m'envahir de nouveau, et ça fait un bien fou. Non pas que je refuse de grandir, mais c'est tellement bon, de prendre tout comme un jeu, de laisser s'exprimer son imagination, sans penser aux conventions, sans songer que, en tant qu'adulte, on doit "prendre ses responsabilités". "S'assumer. "Gérer."
 
Moi, j'ai envie de m'amuser, dans le plus grand sérieux. C'est paradoxal, je sais, mais enfin, vous le sauriez si j'étais complètement équilibrée.
 
Peut-être que je n'aurais pas envie, dans ce cas, de jouer à la dînette et de faire des macarons, comme s'ils étaient vrais, pour les trente couverts du vendredi midi...
 
Et pourtant, tout ça, c'est pas juste pour du beurre.
 

3 commentaires:

  1. n'importe quel enfant te le dira : jouer, c'est vachement sérieux ; alors, avec ce genre d'état d'esprit, je crois que tu tiens le bon bout. Et pis, ça te fait du bien, alors, c'est parfait !

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  2. Quand je me souviens de MiniLoup passant des heures à transférer, du bout des doigts, des grains de riz d'une coupelle dans un bol, je me dis qu'il n'y a rien de plus sérieux que l'apprentissage et que ça nous rend heureux… quel que soit l'âge ! ce n'est pas une fantaisie qu'on s'autorise, c'est de la vraie vie avec de la joie dedans :-)
    Plein de bises la Mouette

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  3. Perso, je ne vois que de l'équilibre dans ce récit :)

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