dimanche 1 juin 2014

Les jours passent...

Les jours passent et les minutes, les heures deviennent précieuses. Pas même le temps de se poser vraiment, pour raconter ici les cocasseries du quotidien, les loufoqueries dans lesquelles je m'obstine, les maladresses, péripéties et autres petits miracles, quand même, qui ponctuent mes journées.
 
Les jours passent, sans qu'aucun ne ressemble vraiment à l'autre. Les questions initiales ont cédé leur place aux premières habitudes et après près d'un mois passé dans cette cuisine du centre, je crois avoir quasiment fait le tour de toutes les tâches quotidiennes. Et pour cause. D'une dizaine de stagiaires, nous sommes passés à... trois.
 
Oui, avant, nous étions deux, voire trois, sur chaque poste, aux entrées, plats chauds ou desserts. Cette fois, plus question de se poser trop de questions. Nous sommes... un par poste. Le premier jour, j'ai cru à une blague.

Mais non, le chef n'avait pas bouffé un clown. On doit vraiment gérer chacun notre poste, comme des grands.
 
Autant vous le dire, le service était folklo, la semaine passée. Et fort instructif, à titre personnel. Eh oui, le nettoyage des égouts et le ramassage des poubelles n'ont plus de secret pour moi. Et je sais maintenant que j'ai une haute résistante à ma propre odeur après un service.
 
Ah, vous vouliez du glamour, peut-être? Comment vous dire, zappez sur la télé, y'aura peut-être davantage de paillettes. Ou, en tout cas, au moins autant que d'écailles dans mes cheveux lorsque j'habille un bar.
 
Oui, messieurs dames, je n'habille pas des Barbie ou des Ken, moi, mais des merlu, des dorades, tous ces globulons qui ne font pas trop les malins, une fois posés sur l'inox. Ils sont tout morts, comme dirait Loulou, mais j'ai néanmoins une pensée pour eux, en me disant qu'ils me servent de cobayes...
 
Les jours passent et Galina, Thi-Kim, Christine et les autres sont partis, bienheureux. Ils ont passé avec succès leur titre professionnel et le responsable pédagogique peut continuer de s'enorgueillir d'un 100% de réussite.
 
J'espère ne pas faire baisser ses stats. Hum.
 
Les jours passent et j'ai mon petit rituel, mon pédalage intempestif (cette sale habitude de me lever dix minutes avant de partir et de courir après le temps ensuite...) et mon arrivée au centre, bien rouge, à une heure qui me semble indécente (je faisais quoi, avant, à cette heure? Ah oui, j'étais parfois encore au lit...), enfilage de tenue, arrivée au poste de travail - souvent la pâtisserie, ces derniers temps - et puis les heures défilent sans qu'on y prenne garde. Après le service et le grand nettoyage qui va bien, je peux compter les points. Normalement, j'alterne entre une brûlure et une coupure, parfois, j'ai des journées blanches, sans rien à signaler et ça, c'est comme une petite victoire.
 
Les jours passent et je n'ai plus d'ongles, coupés à ras et ravagés, comme mes mains, par les produits détergents.
 
Les jours passent et je repars du centre, ravie d'être là et pourtant peu satisfaite de mon "rendement". Je me sens trop lente, trop imprécise, trop... Oui, jamais contente, bien sûr. Je m'offre une petite suée pour le trajet retour, crois me régénérer instantanément sous la douche et lorsque je me pose, en fait... je suis rincée. Alors, je songe qu'il y a une vie à part ça, des devoirs, oui, mais aussi un Loulou à ne pas négliger, un homme à "combler" (on peut y croire, hein), des choses de la vie quotidienne à gérer.
 
Les jours passent et j'enchaîne les essais à la maison. Un kouign amann qui tue sa mère (et les hanches de n'importe quelle femme), des pâtes feuilletées, levées ou pas, qui envahissent le frigo, des cookies, des tartes fraises rhubarbe, des poissons en croûte, des légumes à toutes les sauces... L'envie demeure, une fois rentrée at home.
 
Les jours passent et je réalise que je suis dans ma bulle.
 
Les jours passent et je me sens de plus en plus mal de ne pas être allée aux urnes, l'autre dimanche. Une carte électorale égarée je ne sais où, un repas dominical improvisé, une méga-allergie de Loulou et je n'ai pas cherché plus loin. Ce n'est pas une voix qui...
 
Oui, les jours passent et des tas de gens, comme moi, noyés dans le tourbillon de leur vie et un rien lassés de ce monde politique indécent et si peu crédible, n'ont pas jugé utile de profiter de la démocratie pour se prononcer... Pendant que 25% de Français, eux, s'engouffraient dans la brèche pour mieux se faire entendre.
 
Pour crier sans vergogne leur haine, totalement décomplexés.
 
Les jours passent et je m'interroge sur la possibilité que l'on peut avoir à se projeter dans un monde aussi tordu, dès lors qu'on jette un œil au dessus de sa tête.
 
Les jours passent et je me réfugie dans ma bulle. C'est tout ce que j'ai trouvé, pour l'instant, pour sortir de l'anéantissement. Mais du coup, je dois l'admettre: même si c'est mon avenir pro qui se joue, mine de rien, mes péripéties et joies quotidiennes me semblent particulièrement futiles.
 
C'est comme si je jouais dans un bac à sable pendant que les grands, eux, prenaient vraiment les choses en main. Un peu flippant, parce que j'ai conscience, hélas, que je devrais, un jour ou l'autre, arrêter de m'amuser pour passer aux choses sérieuses...

1 commentaire:

  1. Un kouign amann... de la pure poésie ^^

    Il ne faut surtout pas que tes joies et péripéties te paraissent futiles, au contraire, ce sont de précieux trésors qui font évoluer et donnent les bagages nécessaires pour, comme tu dis, passer aux choses sérieuses. So, be happy !

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