mercredi 31 mars 2010

Le blanc

J'y arrive pas. J'y arrive plus.

Relativiser, prendre du recul, adopter une attitude positive, sourire, espérer, croire aux lendemains qui chantent, arrêter de s'écouter...

Je sais tout ça.

Je sais que rien ne sert de rester ainsi à ruminer.

Loin de moi l'idée de m'apitoyer sur mon sort. Oui, il y a toujours pire. Oui, tout est question de point de vue. Simplement, je n'ai jamais triché sur ce blog, jamais cherché à cacher mes états d'âme et je me retrouve face à une question: dois-je vraiment tout raconter? Est-il décent de se mettre à nu, pour regretter ultérieurement ce moment de vulnérabilité?

Non.

Pourtant, comme je n'aime pas délaisser cet espace, je tenais juste à expliquer ce silence, même si, sincèrement, j'ai hésité à publier ce message. Alors, retenez seulement que cette bafouille n'est que le reflet d'une réalité à l'instant T.

Et que, sans doute, ça ira mieux demain.

Il serait vain, décidément trop impudique et ennuyeux de revenir sur les émotions qui me traversent actuellement. Je n'ai pas la force, voilà tout. Je ne sais plus où j'en suis. Je ne sens plus rien, je n'ai plus envie, je ne vois que du noir.

Et pour contrer cette noirceur, rien ne vaut un blanc.

lundi 29 mars 2010

Cet extra

Pas de "s'il vous plaît", il veut un café, là, tout de suite. Je prends aussitôt une tasse et là, la pyramide s'écroule. Mince, c'était pourtant bien parti...

Ce midi, je faisais un petit "extra". La restauratrice déjà citée ici - ma première cliente, eh, c'est pas rien - organisait un buffet et avait besoin de renfort. Nous étions donc quatre, avec ses deux employées et, je peux vous le dire, quel style! En marinière, dégotée pour l'occasion, nous n'avons pas manqué d'immortaliser le moment, le temps d'une photo, avant de rejoindre nos postes.

Lorsque la centaine de convives a rejoint le buffet, j'avoue avoir été de nouveau survoltée par ce tourbillon, où tout doit aller très vite et sans casse. Rien à dire, j'adore aller au contact des gens. Quelques mots, des sourires en passant, c'est bête et furtif mais ça a suffi à rendre ma journée plus belle. A me sentir utile, aussi, forcément. Dans l'assistance se trouvait même le chef de la fronceuse de sourcils, qui m'a gratifié d'un large sourire. Le monde est petit (la ville mancelle qui plus est).

En fin de service, j'étais là, sûre de moi, à servir le café, lorsque le maire est arrivé, malpoli, réclamant un café sans le "s'il vous plaît" de rigueur. Et donc, la boulette, un grand vacarme, des tasses qui me glissent des mains et... rouge comme une pivoine, j'ai tout rattrapé. Zéro porcelaine cassée. Pas même une tasse ébréchée. J'ai fait comme si de rien n'était, de toute façon, monsieur le maire y a à peine pris garde, avant de filer, sans un merci.

Mon loulou a une théorie sur la question de la politesse : les gens qui en manquent sont d'après lui des personnes dont la tête a été mise à l'envers, à un moment donné de leur vie. Allez comprendre.

En tout cas, moi, ça m'a remis un peu la tête à l'endroit, cet extra...

dimanche 28 mars 2010

La peur du vide

Imaginez, un grand trou noir.

Imaginez, une petite fille, un rien naïve, bercée par ses illusions.

Imaginez la rencontre entre ce grand trou noir et cette petite fille.

"Viens, viens te réfugier dans mon cocon", dit le grand trou noir. "Il y a peu à faire ici, mais te voilà protégée de toute agression extérieure."

La petite fille est tentée de plonger tête la première dedans. L'offre lui semble alléchante et répond à ses besoins primaires. Retourner au chaud, là où ça ne fait pas mal. Oublier. Laisser passer l'orage.

Rester inerte.

"Oui, mais comment vais-je sortir de là, ensuite?" demande-t-elle dans un éclair de lucidité.

Je n'aurais pas la prétention d'écrire un conte à trois centimes, mais je réalise à quel point les automatismes archaïques reviennent au galop, en situation délicate. Je faisais la maligne, hier, en commentant ce mail qui m'a fait si mal. N'empêche que je n'en menais pas large. Qu'il m'a ramenée à ma profonde solitude, à cette détresse à la fois ancienne et nouvelle. Au sentiment que je suis seule au milieu de l'océan, à me débattre pour me rattraper à un bout de bois, une barque, n'importe quoi pour éviter la noyade.

J'ai lu le mail. Une fois. Bah, je m'en doutais. Une deuxième fois. Ah bah quand même, pff... Une troisième fois. Mais pourquoi j'ai foiré le truc. Une quatrième fois... Jusqu'à la nausée.

Ça m'a coupé net l'appétit. J'ai senti les larmes monter, soudain. L'angoisse m'étreindre. Comme tétanisée, je tournais en rond dans mon appartement, cherchant la sortie de secours. Relativiser était une issue ; inutile de s'apitoyer sur son sort, c'est pas ça qui va me faire avancer, blablabla.

N'empêche que je l'ai vue, en moi, soudain, cette petite fille apeurée devant le trou. J'y vais, j'y vais pas? Je continue de m'enfoncer ou je lutte contre le gris qui envahit mon cerveau? Je continue ma régression jusqu'au stade foetal ou je me mets un grand coup de pied au derrière?

Ni une, ni deux, je suis allée au ciné. Deux séances plus tard (faut bien ça, je vous assure), je suis rentrée le coeur un peu moins lourd, finir de me vider la tête devant Desperate Housewives.

C'est ça qui m'a permis d'enjamber le trou noir. Et d'envisager que la route puisse, simplement, être longue avant que je débarque à bon port.

Au fond de moi, la petite fille est toujours là. J'aimerais l'éloigner, la chasser parfois, mais c'est elle aussi qui continue de me faire croire aux contes de fée. Vous savez, quand tout s'arrange et que la fin est belle (en outre, je ne prendrai pas l'option "se marièrent et eurent beaucoup d'enfants", ce qui facilite la tâche et évite quelques débordements domestiques superflus en ces temps de crise).

Naïve, je vous dis.

samedi 27 mars 2010

Et voilà

"Bonjour,

Nous avons le regret de vous informer que nous ne pouvons donner une suite favorable à votre candidature (j'en étais sûre).

En effet, les résultats de vos tests de sélection nous paraissent insuffisants pour vous permettre de rejoindre nos équipes (je vous l'avais dit, que j'avais foiré les tests).

Nous restons à votre disposition pour répondre à vos éventuelles demandes de précisions (non, ça va aller, demander pourquoi ils m'ont trouvée quiche, ça ne me dit rien, je vais pas non plus verser dans le masochisme).

Nous vous souhaitons courage et succès dans la poursuite de vos recherches (tu parles! Ils croient pas si bien dire! Pourquoi j'ai l'impression de rentrer dans un long, très looooooong tunnel?).

Cordialement (ils sont polis, quand même, c'est un mail-type, envoyé à 4h du mat', mais bien comme il faut, y'a pas à dire)

L'équipe recrutement (qui doit rigoler encore de mes réponses. Enfin, z'ont pas que ça à faire non plus, cela dit)"

Les boules.

vendredi 26 mars 2010

Kafka, sors de ce corps

Résumé de l'épisode précédent: la dame blonde, la bonne cinquantaine, maquillée comme une voiture volée, pleine d'aplomb, me rétorque d'un ton un rien hautain que c'est à la chambre de commerce, et non à l'URSSAF, que je dois déposer mes papiers.

Après m'être inscrite au préalable sur le site OFFICIEL de l'auto-entrepreneur, avoir obtenu mon numéro, tout ça, je me souviens que la demande d'ACCRE, exonération de charges sociales -enfin, une bonne partie, faut pas pousser non plus, le père Noël, c'est du pipeau, ok? - la demande, disais-je, ne va pas aller toute seule, avec ses petites pattes, jusque sur le bureau d'une personne, quelle qu'elle soit, CCI, URSSAF ou que sais-je encore.

Dans ma grande bonté d'âme, je l'emballe dans une grande enveloppe kraft et plutôt que de la poster, j'amène le tout à la Chambre de Commerce. Là où la dame de l'URSSAF m'a dit de déposer le formulaire, on est d'accord.

A la Chambre de commerce, l'employée m'indique que je dois aller... à l'URSSAF.

La routine, quoi.

jeudi 25 mars 2010

L'attente

La patience, ça n'a jamais été mon fort. Alors, attendre un éventuel coup de fil - événement positif- ou guetter un mail me signifiant que j'ai bel et bien été une quiche, c'est long.

Très long.

Je m'aperçois des espoirs que j'ai placés dans ce poste et je veux me prémunir de la déception. C'est bien pour cela, d'ailleurs, que j'ai flanché, trop submergée par les émotions pour réagir de façon intelligible.

Inutile de me torturer l'esprit, je n'y peux plus rien, aujourd'hui, et je tente d'occuper le temps comme je le peux, en attendant.

Dans quelques jours, je recevrai de jolies (?) cartes de visite au nom de "Ma p'tite Madeleine"; ma demande d'ACCRE finira bien par atterrir sur un bureau du CFE, dès que j'aurais pensé à la déposer; ma première facture est quasi-prête; je m'interroge sur l'opportunité d'envoyer ma déclaration d'activité à la DSV...

Et je lis les annonces que Pôle Emploi m'envoie, via une alerte. Alors un 18 heures à Belfort pour écrire un journal, gérer une équipe de correspondants, assurer les photos et la mise en page (et si vous pouviez passer le balai en partant, ce serait pas plus mal), le tout au taux horaire du SMIC;

Même taux, mais pour un 26h à Paris; un contrat d'une journée dans l'Allier; à Lille, un autre boulot de journaliste à tout faire pour 18000 euros l'année, un poste de rédacteur avec Bac +4 à 1100 euros à Lyon... Tiens, pas mal aussi, ce salaire: 50% des bénéfices engendrés par article pour un rédacteur sur le web. A Falaise, on cherche un journaliste bénéficiaire du RSA, c'est original, pas vrai?

Ah si, voilà trois offres au salaire attrayant. Ah, il faut parler turc. Ou ukrainien. Ah, en farsi aussi, ça paie. Et là, énorme, 5500 euros mensuels, pour un boulot ô combien attractif, je commence à me pincer pour y croire, jusqu'au moment où je lis : "20 ans d'expérience exigée". Ils parlent en années chien, ou bien ?

Oh que oui, j'ai envie que ça marche, avec ce poste. J'sais pas pourquoi, je sens que je vais m'arracher les cheveux, sinon. Comme un pressentiment.

mercredi 24 mars 2010

Hypocrisie

"Bonjour Madame, je suis bien chez Stéphanie Magut?"

Oui, c'est presque ça, allez, essaie encore (le nombre de fois où mon nom de famille a été écorché, c'est un truc de malade. Je vous passe la liste, j'en suis encore traumatisée).

Non, chez son assistante, mais vous pouvez... OK, je me reprends et je tais cette envie soudaine de l'embrouiller. La pauvre.

" Oui." (je suis drôlement concise, en ce moment, rapport au questionnaire d'hier qui m'a tétanisée, je crois)

" Floriane de l'agence ...euhgpabiencomprislenommaisçafinitenis"

Oh, Floriane, tu as un joli accent fleuri, ne t'appelerais-tu pas Leïla, plutôt ? Ne serais-tu pas contrainte de changer ton charmant prénom pour sonner "plus français", médiocre méthode qui, hélas, touche les services de phoning ? Bon, cela dit, c'est toi qui vois (enfin non, ta boîte qui rentre dans cet ignoble jeu).

"Je vous appelle pour vous proposer un rendez-vous avec l'un de nos commerciaux, afin de vous offrir la création de votre site internet."

J'en reste bouche bée.

Devant mon silence prolongé (cinq secondes de blanc, quand on bosse dans une agence de phoning et qu'on doit renier ses racines, j'imagine le caractère angoissant que la situation génère), elle prend soin de préciser :

"Pour votre entreprise, je veux dire."

Eh bien! Les nouvelles vont vite.

mardi 23 mars 2010

Bienvenue dans la vraie vie

Le coeur palpitant à tout rompre, je jette un coup d'oeil à l'heure, au coin de mon écran. C'est fini, rangez les stylos, rendez vos copies...

Aaaaaaaaaaaaaah, je suis frustrée!

J'avais donc deux comptes-rendus à rédiger, à partir de bandes sonores que la société avait envoyées. Une de huit minutes, l'autre de cinq. Et trois heures pour m'en dépatouiller. Trois heures pour treize minutes d'écoute ? Bah, finger in the noise...

Sauf que. Sauf que je n'avais pas mesuré la complexité des dits-exercices. Synthétiser un discours avec plein de pourcentages, des hausses et des baisses, des actions à valeur majorée, pff, déjà, ça m'a laissé toute chose. Réécrire l'intervention d'un grand ponte de la SNCF, en enlevant les quelques libertés d'expression orale que le monsieur prend invariablement, ça m'a laissé sur le carreau.

Je hurlais intérieurement contre ces grévistes qui hurlaient en bas de chez moi - ou peu s'en faut. Hey, dites, les gars, vous me laisser écouter votre boss, là? C'est mon avenir qui est en jeu!

Je flippais parce que je réalisais à quel point j'étais en train de laisser passer ma chance de me ré-insérer dans la vie normale.

Je dramatise? Je dramatise. Enfin, un peu. Je reste très dubitative sur mes chances, d'autant que j'ai foiré le questionnaire de culture générale. Entre les gros trous sur les choses-que-je-sais-d'habitude et sur les-autres-dont-de-toute-façon-j'ignore-tout, on a volé à ras-les-pâquerettes, là. Au début, c'était facile, elle me demande ce que fait la boîte... où travaille mon beau-frère. Coup de bol. Ça se gâte rapidement, j'avais tout misé sur Lakshmi Mittal, elle, elle me demande qui est Cécile, Cécile, ben tiens, je sais même plus.

Copenhage, le Yémen, France Télécom, il y en a eu pour tous les goûts, du moment qu'on restait dans le secteur économique, politique ou social. Moi, je dis, c'est pas de la culture générale, ça, c'est se montrer sectaire. Parce que si elle m'avait questionné sur le champion de France de pro A, sur le nom de quelques chefs étoilés ou sur les tendances fashion de cet été, là, c'est sûr, je lui aurais montré l'étendue de mon savoir (hum). Mais CapGemini était-il vraiment l'intrus de sa liste? Est-ce que j'ai bien dit "Barroso" et pas "Barruso"?

Dégoûtée, je réalise qu'aucune question n'a été posée sur les acronymes. Rien sur le PER, nada. Ah, si, elle m'a demandé quel était l'intrus entre LCR, NPA, OSEO et Modem. Je sais, elle était trop facile, celle-là. En plus, OSEO, je risque pas de les oublier, c'est le genre d'organisme qui a refusé d'apporter une garantie bancaire à mon dossier.

Ça sert, finalement, la création d'entreprise.

lundi 22 mars 2010

Entre parenthèses

Je signale en préambule que, malgré l'usage intempestif de parenthèses dans le post qui suit, aucun mal n'a été fait à ces petites choses. Leur sur-dosage peut toutefois entraîner un certain mal de tête chez les lecteurs - symptôme que l'on soulagera via l'arrêt immédiat des lignes en question (je dis ça, c'est pour votre bien-être, mais je m'aperçois que je mets de nouveau à mal les parenthèses. Bon, c'est vous qui voyez).

Ce matin, une lettre de l'INSEE m'a informée de ma nouvelle activité: "service des traiteurs".

Ah bon. J'avais écrit "vente de gâteaux" sur le formulaire, histoire de me prémunir d'éventuelles questions, et me voilà donc traiteur.

Oh, je ne vais pas les contrarier, d'autant qu'ils ont des mots sympas pour annoncer la création d'une entreprise, dans leur rubrique "mise à jour effectuée": pour eux, c'est un "événement".

Je ne veux pas tomber dans le triomphalisme de bas-étage et puis, ouvrir une bouteille de champ' toute seule - avec le nez bouché qui plus est - pour si peu, ce serait inutile.

Et idiot, vu que je dois encore peaufiner ma définition du PER et me rentrer dans la tête le nom du PDG d'Arcellor Mittal (Lakshmi, tu parles d'un prénom, aussi, je peux pas compter sur toi, monsieur, tu pousses un peu, là) d'ici à demain matin. Je dois être opérationnelle pour le test de culture générale qui m'attend, option économie, politique et management moderne (palpitant, je sais, j'ai une vie passionnante).

Où en étais-je? Ah oui, le triomphalisme, le champ' et tout ça, pour fêter "l'événement". Non, pour tout vous dire, après tant de jours, de semaines, de mois à espérer, rêver, envisager, renoncer, reprendre espoir, se battre, se décourager, avoir envie de partir à l'autre bout du monde (mais pas au Groenland, parce que je suis frileuse et que mes doigts de pied, aussi connus sous le doux nom de "Knaki Balls", bleuissent en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire), bref, après tant de temps à courir derrière un mirage, j'ai...

Un numéro SIRET.

Et le pire... Je sais pas si je dois vous le dire... Allez, on se connaît, maintenant, vous n'ignorez rien de mes paradoxes et autres contradictions (je vous rappelle, qui plus est, que je suis une FILLE. Une fille, c'est chiant, ça change toujours d'envie et ça fait rien que brouiller les pistes en permanence- cela dit, j'aimerais pas être un garçon, parce que là, y'a du lourd aussi. Mais ce sera l'objet d'un autre post).

Donc, le pire, c'est que ça ne m'a fait ni chaud, ni froid.

Je vous jure.

J'ai vu la lettre, je l'ai décachetée tranquillement, je l'ai parcourue, vite fait, avant d'aller me mettre aux fourneaux (tournée hebdomadaire oblige, ouais, je sais, c'est la grosse classe. Et surtout mon UNIQUE mission de la semaine. Hum). OK, je suis auto-entrepreneur. Dans mon cas, ça ne veut rien dire, parce que je ne vais pas développer l'affaire outre-mesure.

On parlera de beurre dans les épinards, j'imagine.

A la condition, aussi, que je parvienne à me ré-insérer dans la vie normale, en obtenant ce poste auquel je pense de plus en plus, et qui me semble comme tombé du ciel tant il correspond à mes aspirations du moment.

Tiens, je pourrais en parler aux recruteurs. Enfin, si j'arrive à me souvenir de ces maudits acronymes et de l'orthographe du président de l'Union Européenne.

Et là, c'est pas gagné.

dimanche 21 mars 2010

De la nécessité d'être ambidextre

Sortie du bureau de vote, ce dimanche. Loulou, qui traînait des pieds pour s'y rendre, en ressort tout intrigué. Et pourquoi ci, et pourquoi ça, et si y'a plus de votes blancs que de voix pour la droite ou la gauche, ça fait quoi, et Nicolas Sarkozy, est-ce qu'il va partir un jour, moi je crois que oui... Vous voyez un peu le tableau.

Comme il voit que tout ça glisse sur moi sans me faire vraiment réagir - mon cerveau est totalement embrumé par ce foutu rhube- il la joue très offensive:

"Ben moi, si j'avais dû voter, j'aurais choisi la droite!"

Ça marche, mon sang ne fait qu'un tour. Quoi, quoi, vite, une éducation pour cet enfant désoeuvré! (je précise que chacun a -encore- le droit d'avoir son opinion personnelle sur la question)

Je tente de rester calme, à l'extérieur. Je prends mon air le plus mielleux pour tenter d'amadouer le malheureux, voire le faire revenir à la raison - la mienne, de raison (chacun a le droit, blablabla).

"Ah bon, pourquoi, mon coeur?"

"Ben, parce que je suis droitier!"

A quoi ça tient, la politique, quand même.

vendredi 19 mars 2010

Soupe de veau

En cette journée du sommeil, j'ai tenu à respecter les sacro-saints principes, à savoir prendre le temps de rester dans les bras de Morphée. J'avais, il est vrai, un peu besoin de me retaper après une nuit passée à préparer...

... De la soupe de veau.

Cherchez pas, c'était la fièvre.

jeudi 18 mars 2010

Lucky day

Hier après-midi, avant de rentrer at home pour quelques studieuses intentions (chercher un travail, tout ça), je fais un petit détour vers une grande enseigne suédoise, histoire de... Bah, à quoi bon me justifier, j'adore faire du shopping - même si je passe de moins en moins souvent à la caisse, allez savoir pourquoi.

Me voilà donc à m'extasier devant une veste officier, qui serait tellement contente de rejoindre deux de ses soeurs dans mon armoire surchargée, lorsque mon portable me sort de mes rêveries hautement palpitantes. Au bout du fil, une chargée de recrutement. Qui fait suite à ma candidature déposée la veille sur le site de sa société.

Waouh, je suis soufflée par temps de réactivité.

A moins qu'ils n'aient absolument aucun autre postulant... Peu importe, j'accepte de me soumettre à ce premier entretien téléphonique. Allez savoir pourquoi, je garde en main la veste et je reste dans le magasin, au lieu de sortir tout naturellement vers un lieu plus adéquat.

Trop facile.

Je scrute la veste. Je l'essaierai après. Concentration, concentration, au milieu des portants, je sais, le bon sens, c'est pas inné chez moi. Bref.

La chargée de recrutement, charmante, m'interroge sur mes motivations, revient sur ma création d'entreprise avortée et sur ce que sous-entend le poste, rédacteur, en l'occurrence. Il s'agit de retranscrire des propos tenus lors de réunions diverses et variées et de rédiger des comptes-rendus pour les entreprises.

J'en vois déjà qui font la fine bouche, tout ça, quel intérêt, aucune créativité, blablabla. Et puis, ce n'est que pour six mois, blablabla. Pourtant, j'en suis convaincue, je suis faite pour ce poste, vous pensez! A vrai dire, rien qu'à l'idée de retravailler, je sens le palpitant s'emballer.

Et puis les conditions me semblent parfaites, avec du télé-travail comme je le souhaitais, limite si je ne me pince pas pour y croire. J'écoute religieusement mon interlocutrice qui sait trouver les mots pour confirmer mon enthousiasme et je m'imagine déjà aux commandes quand...

"Afin d'éviter une attente trop longue en caisse, H&M vous informe que..." Aaaaah, mais tais-toi, madame, tu me grilles, là! Je me re-concentre, essaie d'ignorer les bouffées de chaleur qui m'envahissent soudainement, feins de n'avoir rien entendu et espère qu'il en est de même à l'autre bout du fil.

Mais je conserve bien le cintre en main, on sait jamais, hein, qu'une harpie me vole la veste.

Au final, je dois passer des tests mardi prochain, avant, peut-être, d'aller au siège de la société, défendre ma candidature.

La veste m'allait. Et au passage en caisse, j'ai eu droit à une réduction sur le prix initial.

Mon jour de chance, j'imagine.

mercredi 17 mars 2010

J'veux faire maman quand j'serai grande

Il mange tranquillement lorsque, soudain, il s'interrompt, nous faisant sursauter, mes petits pois, la fourchette et moi.

"En fait, l'écriture, c'est ton troisième métier."

"Ah oui?"

"Oui, après maman et le restaurant."

Ah oui. Si on veut.

mardi 16 mars 2010

Et ça m'énerveeeeeee...

Après mûre réflexion, j'ai opté pour le régime de l'auto-entrepreneur. Comme il me reste quelques questions à soulever, je file à l'URSSAF. Bien décidée, je rentre dans le bureau. La cinquantaine bien tassée, maquillée comme une voiture volée, elle m'accueille et me laisse quelques minutes avant de considérer l'erreur.

"Nous ne nous occupons que des professions libérales. Dans votre cas, allez voir la chambre de commerce." A côté de chez moi, tiens. Tout va bien.

Me voilà déjà à ranger mes petites affaires lorsque la femme fronce les sourcils (oh non, pas ça!), réfléchit et me dit:

"Mais j'y pense, vous allez fabriquer (elle prend des pincettes pour articuler, on dirait que le terme la dégoûte) des gâteaux, c'est bien ça? Alors, c'est plutôt à la chambre des métiers qu'il faut vous adresser."

"Je ne peux pas, ils vont me dire que je n'ai pas le diplôme requis pour faire de la pâtisserie, ce qui est obligatoire, en tant qu'auto-entrepreneur dans l'artisanat."

" Oui, mais la chambre de commerce vous dirigera forcément vers eux."

Comme un blanc, soudain. J'ai peur de comprendre.

" Ce qui signifie, en gros, que je ne peux pas exercer?"

" C'est ça!"

Allez, au revoir Madame, hein, et bonjour chez vous ('scusez, un reste du Prisonnier, j'imagine).

Donc, si je résume:

Je ne peux pas ouvrir un restaurant car je ne suis pas issue de la profession.
Je ne peux pas être en portage salarial pour vendre des gâteaux car ce n'est pas une prestation mais un commerce.
Je ne peux pas être auto-entrepreneur, car je n'ai pas mon CAP pâtisserie et qu'il ne s'agit pas d'un service commercial mais artisanal.

Zen. Zen. Zen. Rester Zen.

Ce que je sais, c'est que j'ai le droit de rester chômeuse. Mais même ça, c'est un privilège qui va bientôt m'être destitué.

Je me suis malgré tout enregistrée comme auto-entrepreneur, sur Internet, histoire de facturer mes fournées de ces deux derniers mois. J'ai eu la sensation d'un vide, d'un très grand vide. Comme si la dernière marche que je franchissais était en carton-pâte et qu'elle s'effritait sous mes pas.

J'ai envoyé une lettre de motivation, ce soir. Pour bosser dans une boîte normale, exercer un boulot normal, avec des gens qui ne me répéteront pas que je suis dans les mauvaises cases.

Oui, je l'ai un peu mauvaise.

lundi 15 mars 2010

Des portefeuilles débordants

Hier soir, entre deux fournées de cannelés et quelques mots idiots, j'ai enfin cliqué sur le formulaire de l'URSSAF: le sésame pour devenir auto-entrepreneur. Quelques questions plus tard, j'ai reporté la validation, histoire d'éclaircir deux, trois points.

Et comme entre-temps, j'avais rédigé une bafouille pour Pôle Emploi, je me suis dit que mon employeur serait flatté que je la lui apporte directement. Je sais, y'a les pigeons voyageurs, pour ça, et même des facteurs. Mais rien ne vaut un petit coucou, en chair et en os.

En route, donc, vers l'agence. Un peu d'attente, forcément, et lorsque vient mon tour et que je demande à m'entretenir avec un conseiller, la réponse tombe, implacable:

" Ah non, vous savez, ça va pas être possible."

" N'y a-t-il pas moyen de prendre au moins un rendez-vous ? Vous savez bien qu'on ne peut avoir aucune info par téléphone et là, j'ai besoin d'une réponse rapide."

" Je sais, je sais", me répond le monsieur. "Mais", poursuit-il en enfilant son masque d'Auguste, - air éploré garanti - nous avons des portefeuilles débordants."

En gros, je suis le cadet de vos soucis, c'est ça?

C'est ça.

Oh, je comprends, y'a des gens qui n'ont plus du tout de droits. Moi, j'ai encore six mois, pensez donc, la chaaaaaannnce! Pas de raison que je flippe, pas vrai?

Ben si, que voulez-vous, c'est plus fort que moi. Je ne peux plus patienter jusqu'à l'échéance fatale.

Me voilà donc contrainte à la moue et au regard implorant (c'est visiblement contagieux), il lit ma missive, se gratte la tête, consulte une feuille, va voir quelqu'un, revient, repart, revient et hop, il me donne un rendez-vous. Dans une heure.

Alléluia.

Pendant qu'il fait ses allers-retours, une dame au fort accent étranger (mais que fait la police ;) dites?) arrive au guichet. L'employée la regarde, de façon suspicieuse, lui annonce qu'elle est radiée - "RA-DIEE madame", qu'elle lui répète (ça doit être mon imagination, je crois ressentir une pointe de jubilation, dans la voix) - elle lui demande sa carte de séjour et là, de nouveau, mon imagination me laisse percevoir un rien de triomphalisme. "Date de validité, 30 mars 2010, c'est bientôt, madame, hein?"

Je la vois déjà appeler la police. J'ai vraiment trop d'idées négatives, comme si une frange de la population française était fasciste, franchement (on se demande où je vais chercher des trucs pareils...).

Pour le reste, j'ai retrouvé le conseiller qui m'avait déjà reçue voilà quelques mois, qui s'est encore levé voir des collègues, "parce que là, vous comprenez, c'est la partie indemnisation". Mais sincèrement, il s'est montré une fois de plus charmant et à l'écoute et m'a assuré que, jamais ô grand jamais, Pôle Emploi ne me poserait problème. "Ce que vous faites, ça représente beaucoup d'énergie. C'est comme un boulot à plein temps, le stress en plus, même."

Eh bien voilà qui m'a rassurée sur les conditions de travail à Pôle Emploi: certains vivent leur mission sereinement. Même avec des portefeuilles débordants.

dimanche 14 mars 2010

Les sables mouvants sont-ils rock and roll?

C'est l'heure de notre rendez-vous "spécial requêtes en tout genre" ou comment les internautes débarquent ici. Et depuis un mois, je peux vous assurer que le logiciel de stats a enregistré quelques perles. Classons-les par thèmes - oui, j'écris "nous" pour parler de moi, j'ai pris le melon ce week-end. C'est n'importe quoi. Passons.

La requête pratique

" Commencer par des choses basiques puis se lancer"
" Comment affronter les hypocrites"
" Etre rock and roll"
" Frôler cuisse grassouillette"
" Salaire d'un poubellier au Havre"
" La signification de la poudre aux yeux" (et sa déclinaison: "pôle emploi de la poudre aux yeux", je dis ça, je dis rien, je ne fais que retranscrire, bien sûr)

A priori, ces éléments ont autant de rapport entre eux qu'une choucroute avec un plat à tajine et pourtant, je dois convenir que tout ça me rappelle des choses vécues. Mention particulière à "frôler cuisse grassouillette", que j'aurais tout aussi bien pu classer dans la catégorie suivante.

La requête du boulet
" Une fille nue dans le sable mouvant"
" Cuisine-toi"
" Il faut exécuter cette forçat"

Y'a encore du gars qui réclame un "stritease", ou cet autre qui veut savoir si je cuisine nue (je ne peux me passer de mon tablier, sorry). Visiblement lassés de ne pas voir leur désir se concrétiser, les types perdent patience et veulent ma peau. Ouh, j'ai peur.

La requête "va t'acheter un dico, un bled et des neurones"
" Comment avoir des idées pour faire avoir quelque chose"
" La dexripssion de Cosette"
" Ques qui aime les cafards"
" Sexy or mignon or craquant or viril or charmant, homme ou mec chéri barbu or "mal rasé" or "bien rasé"

Déjà, celui qui s'interroge sur le comment du pourquoi pour faire avoir, je m'inquiète pour son cas. Pas gagné. Je ne pense pas qu'il soit très judicieux de conseiller la lecture des Misérables à cet autre qui réclame une "dexripssion" de Cosette. Enfin, la dernière requête, si elle résume bien le concept du garçon physiquement intelligent, n'est guère concise, vous l'admettrez volontiers.

La requête du curieux
" L'homme qui mange l'homme"
" Un homme mange une mouette et meurt"
" Histoire débile à raconter"
" Drôle de bêtisier"
" Anecdotes sur les sables mouvants" (et son "piège à loup sable mouvant")

Celui-là, il veut rêver. Lire des histoires extraordinaires, visiblement. On appelle ses passages sur ce blog des "visites à rebond": genre, il vient deux secondes et déguerpit aussi sec, conscient qu'il ne trouvera pas son bonheur ici (quoique, pour les histoires débiles, y'a moyen de le contenter). Concernant l'homme qui mange une mouette et meurt, je tiens à signaler une chose : on ne répertorie aucune perte, actuellement, parmi les messieurs krès krès méchants qui m'ont agacée.

La requête existentielle
" Fais jaillir la vie "
" Qu'est-ce que tu vas faire maintenant "
" Pourquoi c'est interdit de rire "

Alors là, on touche pleinement à mon état du moment. Petite précision, quand même. Pourquoi serait-ce interdit de rire? On est sur un blog, ici, un espace de liberté, et même si certains veulent achever la forçat, c'est pas le bagne non plus, oh!

vendredi 12 mars 2010

Le temps au temps

Tiens, tiens, mon employeur chéri se réveille... Il a tellement de cas à gérer, actuellement, que je pensais qu'il m'avait un peu oubliée. Pourtant, malgré l'afflux massif de nouveaux collègues, j'ai reçu une lettre de Pôle Emploi, aujourd'hui. C'est un questionnaire que je dois remplir, pour faire état de l'avancée de ma création d'entreprise.

Pôle Emploi. Manquerait plus qu'il mette son grain de sel, celui-là... Parce que je suis dispensée de l'entretien mensuel, pour l'instant, et je ne tiens pas à rajouter du boulot à mon conseiller (que je n'ai pas l'honneur de connaître, d'ailleurs).

Oh, je ne me complais pas dans ce statut d'assistée, ça en devient même lourd. Bien sûr, la dame de la médiathèque m'explique gentiment que mon abonnement est gratuit, la piscine et le cinéma sont presque cadeau, j'ai du temps pour profiter de tout ça et personne, jusque-là, ne m'a vraiment demandé de compte.

J'ai le temps d'aller chercher mon loulou à l'école. De l'amener au foot, sans regarder l'heure à tout bout de champs.

J'ai le temps de mettre le feu à la cuisine, d'aller voir des garçons physiquement intelligents dans les salles obscures et de potasser sur des projets utopiques.

J'ai le temps d'envisager un futur rayonnant. Celui, aussi, de craindre le pire, de peindre le tableau en noir. De m'imaginer, un jour, auteur, le lendemain dans la rue - ou peu s'en faut.

Mais, justement, tout ça ne dure... qu'un temps. Tout ça, surtout, est angoissant.

Les jours passent et j'ai l'impression de manquer de temps, d'espace, pour mener à bien tous les projets qui me sont chers. Je ne serai bientôt plus assistée et si je me retourne, que puis-je constater? Que, concrètement, rien n'a bougé. Ça me désespère et, simultanément, rien qu'à écrire ça, je me fatigue (ça vous arrive, vous, de vous fatiguer vous-même? Ça craint, mine de rien).

Votre projet de création d'entreprise est-il toujours en cours? Oui, que j'ai coché.

Si oui, avez-vous réalisé l'étude de marché, blablabla? Oui, que j'ai coché.

Date prévue de démarrage de votre activité?

...

Pff, ils m'en posent, de ces questions. C'est un peu comme me demander la météo du mois prochain. J'aurais tendance à prévoir un temps pluvieux - voire orageux, selon mon humeur. Mais qui sait, le printemps pointera peut-être son nez plus tôt que prévu.

Et il ne faut jamais négliger l'impact de quelques éclaircies...

jeudi 11 mars 2010

Wanna be a ghost

Généralement, lorsque je veux rire un peu, je mange un clown, donc, ou je m'amuse avec Loulou. L'une de nos activités favorites, c'est de jouer au fantôme. Hier encore, il s'est recouvert d'un plaid et hop, vas-y que je marche en faisant "hou, hou" de façon extrêmement crédible.

A cet instant, j'ai à peu près 3 ans d'âge mental. Et je suis bien contente de vivre en solo, rapport aux moqueries que j'évite.

C'est là que je l'appelle en lui demandant de venir, "vite vite, y'a un fantôme dans le salon!" Ni une ni deux, le plaid s'aplatit, une tornade renverse tout sur son passage et mon blondinet revient, haletant, réclamant de voir ce fameux fantôme.

Oh, je sais, c'est visuel et j'imagine votre déception, vous vous imaginiez que j'allais tenir mes promesses et être aussi drôle que Jean-Claude Dus dans sa jolie combinaison de ski orange.

C'est moche, oui.

Et puis, pourquoi je vous raconte ça, hein?

C'est tout bête mais j'ai appris ce soir que "nègre" se disait "ghost writer"* en anglais. A vrai dire, ce terme de fantôme me semble beaucoup plus judicieux que celui de nègre. L'homme de l'ombre, qui écrit pour une personnalité, reste transparent, mais cela lui confère un statut plus... poétique, je sais pas.

Et justement, nous évoquions la question, aujourd'hui, avec la personne qui m'a contactée, via ce blog (comme quoi, tout arrive) pour m'en dire plus sur la société de portage salarial qu'il représente. Je lui ai parlé de mes envies d'écriture, de devenir nègre et lui nuançait en invoquant cette fameuse part d'ombre à laquelle est confiné le "fantôme".

Bien sûr, j'imagine que nous aspirons tous à une forme de reconnaissance mais je reste persuadée que je pourrais aussi revêtir ce plaid (et faire hou hou, mais ça ne présente pas trop d'intérêt, surtout face à des éditeurs potentiels) et aller conter la vie des autres.

Oh, ce n'est pas la première fois que je vous en parle. La revoilà avec sa lubie à trois centimes, pensez-vous.

Mais non, je cherche des pistes. Je suis en quête de que je veux faire, au fond. Le conseiller m'a suggéré de prendre un statut d'auto-entrepreneur pour l'aspect cuisine, et de cumuler avec le portage salarial pour l'écriture. Tout ça me semble plutôt sensé.

Me reviennent alors en tête les mots de Marie-Claude, qui m'assurait que je n'aurais pas le temps de coucher mes états d'âme - ou ceux des autres, esprit du fantôme oblige - en me lançant derrière les fourneaux. Alors, dois-je faire un choix? Renoncer à l'une de mes passions pour me consacrer à l'autre, m'y investir à fond, avec le risque que mes efforts ne paient pas?

Chat échaudé craint l'eau froide, dit-on. J'en suis de plus en plus convaincue. J'ai du mal à mettre tous mes oeufs dans le même panier, depuis l'échec du restaurant, mais je suis dans le même temps persuadée que la dispersion m'empêche d'avancer à la vitesse qu'il faudrait pour développer l'une ou l'autre activité.

Après avoir raccroché, j'ai ouvert un fichier. Mon CV. Je l'ai parcouru et me suis inscrite sur viadéo, un site de réseau social professionnel, histoire de faire à mon tour "Hou, hou". Parce que si l'envie de jouer au fantôme me taraude, il me faudra bien, un jour, sortir de l'ombre et aller me faire connaître... auprès de chasseurs, tiens, pourquoi pas?

* Excellent film de Roman Polanski, avec le physiquement charmant** Ewan Mc Gregor.
** Oui, je sais, ça change. Mais que voulez-vous, le charme écossais...

mercredi 10 mars 2010

Attendre, toujours attendre...

La patience et moi, ça fait deux. Alors là, autant dire que je ronge mon frein. Ce matin, j'ai eu une explication quant à l'annulation du rendez-vous. La structure que je souhaitais rejoindre va mal, très mal et son sort sera statué vendredi prochain. Autant dire que ça sent un peu le sapin. Et que les quatre-vingt dix entrepreneurs actuellement salariés là-bas vont être priés d'aller voir ailleurs.

Mon interlocuteur, au téléphone, était le même qui avait animé la réunion d'information. Il m'appelait car il travaille à Angers, au sein de la coopérative que j'ai contactée, hier, cherchant un nouveau point de chute. Et comme il me l'a expliqué, ça va être compliqué d'accueillir tous les entrepreneurs laissés sur le carreau et de convaincre les collectivités locales - qui financent en partie la structure - que, si, si, il faut encadrer, en plus, des personnes étrangères au département.

Les portes qui se ferment, je commence à en avoir l'habitude. Je ne me formalise plus trop. N'empêche, je me suis dit que les embûches se multipliaient. Mais pourquoi ne pas chercher un boulot "classique", dans ma branche ? (Parce qu'il n'y a pas d'offres, peut-être? Ah, pas bête) Et puis, petite chance, mon interlocuteur s'est souvenu de moi, lorsque j'ai évoqué mon projet. Je l'ai senti sourire (oui oui, au téléphone. Je ne suis pas mytho, je vous jure, il a souri. Pourquoi, en revanche, je ne saurai être aussi catégorique...) et il a poursuivi:

"Bon, évidemment, nous ne pourrons pas accueillir tout le monde. Mais il faut dire aussi que la coopérative sarthoise n'effectue pas de tri sélectif et passe autant de temps avec une personne qui bosse cinq heures par mois que pour d'autres à temps complet." Comprenez qu'ils ne rapportent pas beaucoup et qu'à ouvrir ses portes à tous sans distinction, la structure s'est un rien auto-sabotée.

Je ne peux m'empêcher d'imaginer la précarité que vivent certains "salariés" et voilà qu'une angoisse me traverse. Moi aussi, bientôt, je serai dans un stade très, très précaire. Des petites sueurs pour démarrer la journée, j'avais bien besoin de ça.

Lui n'a visiblement rien perçu et poursuit:

"Écoutez, j'ai vos coordonnées, je vous rappelle dès que nous connaissons la décision. Nous prendrons sans doute quelques entrepreneurs, alors..."

Alors, il faut attendre. Je commence à bouillir, avec cette drôle de sensation de me démener pour un impact minimum. Dans le même temps, ma "cliente" m'a appelée, cet après-midi, pour une nouvelle commande de cannelés, en plus de la -désormais classique, ah ah - fournée hebdomadaire.

J'aimerais tellement n'avoir qu'à me préoccuper des courses à faire et de la cuisson idéale des petites bêtes sucrées. N'avoir à penser qu'aux nouvelles recettes et aux heures de livraison, au lieu de m'interroger en permanence sur le sens de tout ça.

Au lieu de patienter, en attendant une potentielle réussite, une issue favorable qui tarde, qui tarde...

Ne pas se décourager, ne pas se décourager... Y croire, vaille que vaille. Allez, j'imagine que vous me voyez sourire, derrière votre écran. Vous n'êtes pas mytho et vous le sentez, ce genre de choses, pas vrai?

Histoire de vous donner raison, je vais manger un clown et je reviens.

mardi 9 mars 2010

Coup de bambou

"Bonjour,
Nous sommes dans le regret de vous informer que votre rendez-vous du 18/03/2010 à 15h est annulé. Nous vous contacterons ultérieurement. Merci de votre compréhension.
Cordialement."

Le message vient de la coopérative de portage salarial. Je les rappelle aussitôt, même s'ils écrivent qu'ils le feront. Et là, coup de bambou.

"Nous ne recevons plus personne. Nous avons suffisamment d'entrepreneurs et sommes en pleine restructuration."

C'est pas comme si vous aviez organisé, voilà à peine deux semaines, une réunion d'information pour informer de potentiels clients, c'est sûr.

C'est pas comme si vous aviez pris tous les renseignements, comme si le contrat de travail n'était plus qu'une formalité.

C'est pas comme si j'avais l'impression d'être maudite.

Oui, coup de bambou car le portage salarial me semblait la meilleure solution, dans mon cas. D'ailleurs, je venais juste d'évoquer la question avec un ami et le temps me semblait long jusqu'à ce 18 mars. Alors, maintenant, je fais comment? Je reste chômeuse? Je rejoins les rangs des auto-entrepreneurs? Je m'exile?

Je m'exile. Oh, pas loin, j'ai appelé dans la foulée une autre coopérative, dans le Maine-et-Loire, qui présente les mêmes conditions. Ils doivent me rappeler, eux aussi. De toute façon, je ne les lâche pas. J'espère juste ne pas me prendre une nouvelle porte en pleine face.

Je vous jure, y'a des jours, mieux vaudrait rester couché.

lundi 8 mars 2010

Fille perdue, cheveux secs, dans la Lune

Je n'avais jamais vu de tels escaliers auparavant. Ou plutôt, autant de marches. Au loin, je croyais deviner des temples Incas, ou du moins l'idée que je m'en faisais. Avec tout ce brouillard, ce n'était pas évident de distinguer avec certitude les éléments.

A propos de certitude, j'en avais une: j'allais les sentir passer, ces marches. J'aurais pas dû reprendre de crêpes au chocolat... Les autres semblaient vaillants alors, bon, j'ai cédé et nous sommes partis. Soudain, une apparition fantastique. "Là, c'est la Lune!" J'étais soufflée. "Et là, regarde, c'est Jupiter", m'a assuré une copine de randonnée. La planète m'a éblouie, je suis restée là, fascinée et pourtant, je n'étais pas au bout de mes surprises. Sous nos pieds, on apercevait Mars. Et à notre gauche... la Terre.

C'était hyper bien fait, y'avait même le nom des pays qui s'affichait. Genre, comme sur un Atlas. Déjà, ça, ça m'a semblé un rien louche. Et dès que les connexions se sont enfin faites, là-haut, j'ai réagi. Comment aurais-je pu la voir, notre planète, de si loin? N'aurais-je pas dû être... dessus?

J'ai regardé autour de moi. Je flottais, dans l'obscurité, au milieu des étoiles.

Je vous rassure, je n'ai rien fumé, ni piqué les amphets de mon voisin (d'ailleurs, je n'ai pas de voisin, j'ai une voisine. Et puis des gens que je n'ai jamais croisés, c'est drôlement bizarre, la vie moderne, quand même. On habite les uns à côté des autres, mais comme sur Facebook, on peut se croiser dans la vraie vie sans se dire bonjour. Bref.).

Malgré la promiscuité avec les Soeurs de la Miséricorde - mes voisines du dessus - je n'ai pas plus été touchée par la grâce. Non, non, c'est juste que j'ai fait ce rêve de marches longues comme un jour sans fin, ce week-end, avant d'avoir de nouveau la tête dans les étoiles le lendemain, dans un songe un rien similaire.

Alors, je peux vous l'assurer, malgré ce qu'elle subit, la Terre reste une planète sublime. Bon, ok, c'est mon imagination qui me guide et mon esprit qui me donne à voir de jolies choses. Au delà de cela, si j'ai parfois quelques difficultés à interpréter mes rêves (pourquoi Dark Vador m'a-t-il poursuivie, pourquoi a-t-on coupé le tronc de la Reine d'Angleterre, je vous en passe et des meilleures), là, ça me semble assez clair.

Les marches ? Pour le long chemin vers la gloire. Entendez par "la gloire" un boulot - je préfère la jouer modeste (même mannequin chez Olida, je pense pas que j'aurais pu, alors les paillettes, non, vraiment, ce n'est pas pour moi).

Les planètes et la tête dans les étoiles ? Pour mes rêves (délires?) et envies que je ne me résous pas à effacer, malgré tout (entendez malgré la crise, malgré les claques, malgré mon statut de fille-perdue-cheveux-secs... La liste n'est pas exhaustive). Oui, cette métaphore nocturne et lunaire me laisse penser que je n'ai pas les pieds sur terre. Que je devrais peut-être chercher un "vrai" boulot au lieu d'aller m'en inventer un.

Je connais ces hauts et ces bas, parce qu'ils sont dans ma nature, d'abord, mais aussi parce qu'ils sont propres à toute création, où l'euphorie précède le doute, et réciproquement.

Après la semaine passée, pleine et exaltante, j'ai un rien déchanté en ratant tout bonnement une fournée de cannelés (j'en avais une centaine à livrer...). Une histoire de nouveau moule que je dois apprivoiser, un peu comme la poêle pour la première crêpe ou un vieil ami, retrouvé par hasard, que l'on n'a plus croisé depuis la maternelle. Ou... Vous voyez le tableau.

Donc, voilà, mes petites choses sont noirâtres, ou biscornues, ou aplaties, ça va pas, je ne devrais pas m'en rendre malade. Mais c'est plus fort que moi, je me mets à douter, je pense à la cliente, ça va pas lui plaire, vite, je refais de la pâte, mais du coup, je ne pourrai pas lui livrer à l'heure, oh, mais pourquoi j'ai accepté sa commande, d'façon, j'suis nulle, et pis c'est même pas rentable mon truc, et pis comment ça peut l'être alors que je suis pas foutue de maîtriser ma cuisson, et pis avec un seul four...

Et pis, et pis, et pis...

La loose. Donc, là, j'ai sorti la tête du seau, négocié avec le moule (faut lui parler doucement. A savoir, baisser la température. Il avait trop chaud, le coco, c'est pour ça, il suintait un peu) et c'est reparti. N'empêche que ce petit grain de sel m'a perturbée, que je me demande comment elle va accueillir ces nouvelles douceurs, les madeleines ne seraient-elles pas, elles aussi, un peu trop cuites? La loose, je vous dis. D'autant que dix mille questions me viennent à l'esprit et que je m'interroge sérieusement sur la viabilité de tout ça, comparé au temps et à l'énergie que j'y consacre.

Oh, bien sûr, ça ne sert à rien de se triturer à ce point, on verra bien. Mais j'en suis à un stade où tout doit rouler, sinon, le doute est de nouveau prégnant. J'ai besoin de certitudes, mais, comme sur ce chemin parsemé de marches, c'est le brouillard.

Finalement, ça m'allait bien, d'être la tête dans les étoiles...

vendredi 5 mars 2010

L'éponge magique et les gilets à poches

La honte.

Vous voyez la pub où une nana en turban vit dans une porcherie, qu'elle transforme illico en palais brillant d'un simple coup d'éponge?

Ben, j'aurais pu la jouer, aujourd'hui. Persuadée que les taches de gras, là, ne partiraient jamais, je cuisinais donc, insouciante, avant d'y regarder de plus près. Tiens, si j'essayais, avec un peu d'huile de coude et beaucoup de dégraissant? Parce que, quitte à démarrer mon activité chez moi, autant que ce soit N.I.C.K.E.L. Lorsque Marie-Claude a évoqué la question, hier, je ne me sentais même pas concernée. Bien sûr que tout était parfait. Hum.

Trois heures, une éponge noire et des mains desséchées plus tard (un peu brûlées aussi, mais trop facile, de mettre des gants, avec un produit corrosif...), je peux enfin dire que ma cuisine est N.I.C.K.EL et le four débarrassé de ces quelques éléments incendiaires que j'avais négligés et qui m'ont valu quelques flammes.

La honte, donc. Mais là, ça va mieux, les placards sont rangés, l'outil de travail est fin prêt et vous pouvez même passer le gant blanc au dessus des meubles, je resterai zen. J'ai écouté Marie-Claude.

Peaufiner les détails, qu'elle a dit la dame. Alors, je m'affaire. Avant de me transformer en fée du logis, j'avais ressorti des placards toute la doc' sur la création d'entreprise et potassé, aujourd'hui. De la compta, un début de factures, un plan d'action, le projet commence à prendre forme, même si je me refuse à y mettre une quelconque pression. Le statut d'entrepreneur salarié, que je m'apprête à endosser, me permet de préparer les choses sereinement, sans penser, déjà, aux charges qui tomberaient si je choisissais de créer ma boîte de façon indépendante.

Je suis donc retombée sur les dix mille versions de mon (feu) prévisionnel. Sur tout un tas de recherches qui m'avaient permis d'établir mon étude de marché. Des notes, des listes de choses à faire, des noms, des numéros de téléphone... J'ai tout rangé dans une boîte, sans états d'âme, sans regret. Je n'ai gardé que l'essentiel sur mon bureau, histoire d'être carrée quant à l'aspect administratif du projet. Le reste, c'est de la littérature.

A propos de littérature, je suis retombée sur les journaux de L'Hôtellerie Restauration, publication hautement instructive à laquelle je m'étais abonnée. Remplie de conseils sur la meilleure façon de gérer la crise, la propagande sur les grandes manoeuvres que les restaurateurs auraient réalisées depuis la baisse de la TVA, sans oublier les innombrables annonces de fonds de commerce à 800.000 euros ou le secret pour faire croire que les oeufs en neige sont faits maison.

En feuilletant ces pages que j'avais mises de côté, je me suis projetée d'emblée chez Métro, où je suis également allée cette semaine. Ah, Métro, son univers impitoyable, rempli de restaurateurs avec le même gilet à poches -et sans manches, alors qu'il caille sévère, dans les rayons - et la démarche un rien lourdaude. Oui, Métro et ses chariots géants et difficiles à manier, ses étals remplis de boîtes de dix kilos de crème anglaise toute faite - oui, aussi - et de couteaux à 150 euros pièce... C'est marrant, je ne me sentais guère à ma place, là-bas, et pourtant, j'y ai trouvé de quoi confectionner pas mal de pâtisseries, pour tester de nouvelles recettes, d'abord, avant d'aller vendre mes douceurs.

Là où ça devient drôle, c'est que je veux proposer ma production aux restaurateurs, ces mêmes toqués avec leur gilet à poches et leur air supérieur. Heureusement, ils ne sont pas tous faits dans le même moule que mon ami le chef sachant. Certains pros, subtils et délicats - comme une certaine cafelière - détonent tout autant dans ce décor plein de testostérone et de gros bras.

Prenez par exemple les acteurs du collectif bio. Sait-on jamais, je pourrais être amenée à bosser pour eux. Pour eux ou avec eux? Pour les avoir de nouveau rencontrés hier, je reste circonspecte sur leurs attentes réelles. Confrontés aux réalités économiques, ils envisagent de faire de la livraison de plateaux bio aux entreprises, mais n'aspirent en vérité qu'à ouvrir un lieu de vie, une sorte de cantine améliorée. C'est comme lorsque j'envisageais de faire les marchés en attendant d'avoir mon local. C'est bien, d'être pragmatique, mais au quotidien, n'y a-t-il pas le risque de s'enfermer dans une vie que l'on n'a pas choisie? Eux en sont à cette réflexion et du coup, tout ça me semble de nouveau trop flou.

Peu importe, de toute façon. Je ne remets pas mon destin entre leurs mains, préférant démarrer, seule, mon activité. Quoi qu'il arrive, ça m'aura au moins permis de vérifier que ça marche, le coup de l'éponge magique. Même sur une porcherie.

Non, vraiment, la honte.

jeudi 4 mars 2010

J'ai trouvé les clés!

Je vous passe les détails sur une nuit pleine de clés dispersées ça et là (aucune symbolique, sinon le signe de ma préoccupation des dernières vingt-quatre heures), j'avais décidé de consacrer mon énergie à quelques activités plus productives.

C'est ainsi que j'ai pu converser un long moment, au téléphone, avec Marie-Claude, charmante pâtissière qui a tenu un salon de thé à Paris avant de se reconvertir dans la livraison de gâteaux dans les établissements de la capitale. Une vraie mine d'informations, forcément, et plein de conseils ingénieux qui m'ont confortée dans l'idée que c'était possible.

Le maître-mot de tout ça? "Oser", m'a-t-elle répété. "Vous avez tout à gagner." Voilà le feu vert que j'attendais pour me lancer, démarrer le projet officiellement dans ma cuisine - en prenant garde de ne pas mettre le feu à chaque fournée. Je sais d'ores et déjà que les jours prochains seront consacrés à la mise en place concrète de l'activité, une sorte de plan d'action, entre sélection accrue des recettes, coûts de revient, liste des restaus à démarcher, confection et photo de chaque douceur.

Et... l'obligation de trouver des cobayes pour valider de nouvelles recettes. Je ne m'inquiète pas trop sur ce plan, à vrai dire.

Marie-Claude m'a conseillé de bien peaufiner le démarrage, pour ne pas me planter. D'arriver devant les restaurateurs, tirée à quatre épingles "parce que si j'avais le malheur d'être moins bien habillée un jour, ma tarte était tout de suite moins bonne aux yeux des clients", a-t-elle témoigné.

Euh, je me demande si j'ai bien fait d'aller voir le forçat toqué, les cheveux mouillés et en jean, l'autre jour. Et mon arrivée à vélo devant les autres établissements m'aurait-elle joué des tours? Je me rassure intérieurement en relativisant. On est en province, ici, pas à Paris, et pas dans le 16e, notamment. N'empêche, elle n'a pas tort. La coupe j'en ai marre de vivre, c'est moyen.

Elle aussi a atténué ses propos. Puis, m'a poussée à "rentrer, quel que soit l'endroit, téléphoner, persister". A croire en mes produits, en somme.

Comme dans mon ancienne vie, je ne nourris pas spécialement de doutes quant à mon travail en lui-même, un véritable paradoxe lorsque l'on a comme moi une confiance en soi proche de zéro. Et ça ne m'effraie pas d'aller à la pêche aux clients. Je trouve ça même plutôt excitant, sans doute parce que c'est le début.

Marie-Claude m'a aussi raconté les aléas du métier, les gros clients qui oublient de régler la facture, ceux qui profitent d'un départ en vacances pour aller pêcher au rayon surgelés de chez Métro des douceurs industrielles à bas prix - concluant que c'est quand même beaucoup plus rentable, quoique moins bon.

Moi aussi, je vais tomber sur ce genre de spécimens qui, englués dans la crise, ne peuvent envisager de privilégier le goût à la rentabilité immédiate. Pas le temps, pas les moyens, pas le coeur de penser qu'à long terme, ils se privent d'une clientèle déçue par une qualité moindre.

Après tout, peut-être aurais-je réagi ainsi, moi aussi, si j'avais dû gérer ce restaurant qui m'a filé entre les doigts. Aujourd'hui, ça me va bien d'être dans la peau d'un fournisseur. Tout reste à faire, et j'ai conscience du chemin à parcourir, mais au moins puis-je tracer ce long parcours de façon indépendante.

Alors, à défaut de clés de voiture - j'ai fait une croix dessus, hein - j'ai au moins trouvé celles dont j'avais besoin pour me lancer. Autrement plus essentiel, n'est-ce pas...

mercredi 3 mars 2010

Bourde & bouderie

Profil recherché: sens pratique. Un internaute a débarqué ici après avoir tapé cette requête. Il n'a pas dû être déçu. Si, en plus, il cherchait une personne rigoureuse, je lui souhaite de ne pas s'être éternisé.

Petite explication? Avant de partir à Lyon, il me semble - je dis bien, il me semble - avoir rangé mes clés de voiture. A mon retour, je ne les ai pas retrouvées, mais qu'importe, j'ai pris un double, un matin où j'étais pressée.

Hier, le voyant du carburant s'affichait, de façon menaçante, sans relâche. Je vais donc à la pompe... Et là, je réalise ma boulette. La clé du bouchon est avec la clé de la voiture. Et comme ce ne serait pas marrant sinon, le double de cette clé est resté avec - tout ça parce que j'avais eu la flemme de les séparer, au moment d'acheter un bouchon.

Je rentre en serrant les fesses mais finalement, j'arrive sans encombre. Pas de panne mais il est urgent de remplir le réservoir.

Voilà pourquoi j'ai fouillé, re-fouillé, vidé, re-vidé mes placards, mes poches et tout ce qui pourrait contenir des clés. Le gardien a bien un trousseau, mais rien à voir. Je suis passée aux objets perdus, rien (c'est fou, d'ailleurs, le nombre de clés égarées). C'est quand même dingue, cette énergie perdue pour une bourde.

Ce soir, un éclair. Les aurais-je perdues à Lyon, à l'hôtel - en supposant que je les aurais amenées avec moi? J'appelle. "Oui, nous avons trouvé quelque chose après votre départ". Je sens déjà le soulagement.

"Une paire de baskets."

C'est c'la, oui... Pourquoi je vous raconte ça? Parce que je fais un peu la grève, aujourd'hui. Pas de commentaires ou si peu, j'ai l'impression parfois de parler à un mur (et on sait bien qu'il n'y a que sur Facebook où on peut le faire sans crainte du ridicule. Ou si peu). Alors, quitte à ne pas être lue, autant me défouler ici. Je sais, ce n'est pas logique, et c'est moche de bouder.

Mais que voulez-vous, j'ai pas non plus trop le temps, là. Une histoire de clés à retrouver.

mardi 2 mars 2010

Retour vers le futur

Quitte à incendier l'immeuble, autant rentabiliser. Hier, en préparant ma livraison de petites douceurs, j'avais multiplié les doses. Autant vous dire qu'en sauvant les cannelés d'une mort certaine, j'ai surtout senti cet immense soulagement en constatant ma force de souffle sur le mini-incendie.

J'suis trop forte.

Car, oui, j'avais une idée derrière la tête.

Me goinfrer de cannelés?

Nan. Depuis la terrible vision de certaines photos où, tel Bidendum, je pose sans imaginer que je ressemble à un pachyderme, je suis on diet. Du genre légumes & légumes. Donc, les petits gâteaux, ils sont bien gentils, avec leur vilaine tête de tentateurs, mais pour moi, c'est no way. Vade retro satanas. C'est comme une mini-torture, cela dit, je vous le concède.

J'avais donc tout planqué - bien m'en a pris, Loulou s'est découvert une passion pour les cannelés - emballant juste ce qu'il faut pour démarcher deux restaurants. Après tout, autant voir concrètement si mon offre de livraison tient la route.

Arrivée chez le premier, que je connais pour y avoir bricolé deux, trois fournées sucrées. Compression maximale des coûts de revient, je doute fortement qu'il y aura une suite. Au moins, j'aurais essayé.

Au moment de pousser la porte du second, je sens une poussée d'adrénaline. Je me suis collé un peu de pression, là: je vais démarcher le forçat toqué, rien de moins. D'un coup, je me sens ridiculement prétentieuse.

Je croise tout le monde, la femme du chef, le maître de salle, le cuistot physiquement intelligent et donc, le big boss. Qui n'a visiblement toujours pas mangé un clown - ni même dormi, si j'en juge à ses cernes et son visage émacié. Au début, je lui parle de la possibilité de louer sa cuisine (il m'avait évoqué l'idée, au moment du stage).

"Avant, j'aurais dit oui. D'autant que l'on envisageait de fermer le soir, comme ça ne marchait pas. Mais depuis quelques temps, on ouvre souvent, notamment pour des réservations de groupe."

"Tant pis pour moi, alors, mais c'est plutôt bon signe pour vous, pas vrai?"

"Oh, c'est toujours dur."

Un lexomil, vite, pour le monsieur. Et vous m'en mettrez un tube. On cause crise, marasme, tout ça et j'ai soudain envie de me pendre. S'il y avait des rideaux dans le restaurant, je veux dire.

Comme je ne dispose pas des munitions idoines, que je n'ai pas envie de mourir - surtout pour une bête question de crise - et qu'en plus, j'ai mon fils à aller chercher à l'école ce soir - je chasse les idées funestes de mon esprit embrouillé et tente la solution extrême.

Le sourire.

Sérieusement, je ne sais pas si vous imaginez la portée d'un tel exploit. Sourire face à ce stakhanoviste; enchaîner, de façon légère, sur le deuxième sujet, là, y'a difficulté force 5. Donc, je souris et évoque mon offre, lui présentant les bouchées sucrées. J'imagine mon sourire se figer un peu, mais il continue de m'écouter. Je flippe, il va refuser tout net, non mais quelle idée j'ai eue, comme si ça pouvait l'intéresser...

Ça l'intéresse.

Dès que j'ai un statut officiel et une tarification établie - dès qu'il a goûté et validé les douceurs, aussi, évidemment - je le contacte de nouveau. Et on fait affaire.

Est-ce que je fais fausse route? Ce projet est-il viable/ rentable/ supportable? Abominable? Aucune idée. Mais je suis sûre d'une chose, je ne me lasse pas de cette sensation d'écrire chaque jour une nouvelle page. Il y a pas mal de passages décousus et stériles, certes.

Mais au final, je me sens vivante, malgré tout.

lundi 1 mars 2010

Où je ressors le macaron rose

Voyez-vous, à l'heure où je vous écris, je viens de survivre à une intoxication. J'exagère à peine - ma toux sèche et les fenêtres grandes ouvertes en attestent - j'ai bien failli mettre le feu à tout l'immeuble.

La cause? Les cannelés. Ces petites bêtes, c'est un rien capricieux dans un four. Surtout lorsque le four est sale. Hum.

J'avais déjà vu quelques flammes jaillir, sous la plaque, ces derniers jours, mais enfin là, je me suis fait une petite peur. Donc, je vous le dis avec les yeux qui piquent: la cuisine, c'est dangereux.

Et la restauration, c'est dur, vous savez ma p'tite dame, ça aussi je le sais. Les rabats-joie du fond, je vous ai repérés.

Bref, je dois arrêter de faire l'autruche, si le rythme des commandes sucrées s'intensifie, il va bien falloir réfléchir aux options qui s'offrent à moi. Et ça tombe bien, j'avais une réunion, ce matin, qui tombait à pic. Agnès et Denis, deux des instigateurs du projet bio, m'avaient en effet conviée, afin que nous réfléchissions à un avenir brillant, merveilleux et extraordinaire (je m'emballe, c'est le gaz du four, j'imagine).

Nous nous sommes découvert un fort pouvoir burlesque (je leur racontais mon projet, ils avaient l'impression que je lisais le leur) et pas mal de points communs, logiquement. En même temps, contrairement à mon ami le génie, concepteur du salon de thé (oh, d'ailleurs, il ferme définitivement... Paix à son âme. Non, ça fait un peu méchant, ça, j'oserais pas. Enfin si. Bref), je n'ai jamais prétendu initier un projet avant-gardiste et jamais vu. Et les gens qui cherchent à créer un espace de vie, un cocon tout doux, tout chaud, y'en a à la pelle. D'où sont issus les plus fous, ceux qui vont au bout de leur(s) idée(s).

Alors, au fur et à mesure que je les écoutais, je visualisais la scène chez moi, imaginant tous les tiroirs s'ouvrir, les documents, recherches, business plan et autres prévisionnels s'extirper les uns après les autres, comme soulagés de sortir de l'ombre après trois mois de mise au placard. Le gros macaron rose retrouvait des couleurs. Le projet était là, à retirer la terre sous laquelle il était enfoui, respirant de mieux en mieux alors que les minutes s'égrenaient.

La Raison, cette grande dame que j'ai la foutue habitude d'ignorer trop régulièrement, m'a alors rappelée à l'ordre. Non, non, tu avais dit que c'était terminé, que tu rangeais tout ça loin dans ta tête, comme un Eldorado que tu atteindrais, sait-on jamais, quand tu serais grande.

La folie, cette tentatrice, a surgi et a pris la parole à ma place. Oh oui, que ça me tente de tâter du vrai fourneau, et pas une saleté de four qui prend feu pour trois malheureuses centaines de petits gâteaux.

En gros, je pourrais développer mon activité de confection et livraison de gâteaux, en travaillant dans une vraie cuisine, tout en me joignant par ailleurs à ce groupe revu et corrigé, qui a su se poser de nouvelles questions et combattre l'utopie de ses premières réflexions. Dans un monde parfait, cela me laisserait même un peu de temps pour élever mon fils, voire vivre, écrire et rencontrer le prince charmant (le gaz, je vous dis, le gaz.)

Alors, voilà, j'ai froid (les fenêtres ouvertes), les yeux qui piquent et le coeur qui balance, surtout. Il devient urgent pour moi de prendre des décisions sages et prudentes et aller m'aventurer dans un nouveau projet ne s'avère guère raisonnable. Mais si vous me lisez un peu, vous devinerez que mon petit grain m'incite à aller fureter, au cas où, vers une expérience inédite, excitante et pleine de promesses.

Dès que ça sent le gaz, je sors.