vendredi 10 juillet 2009

Jouer à la marchande, part two

Dans le village vendéen où nous passions nos vacances estivales, nos motivations principales, c'était la plage, le glacier - qui passait avec sa camionnette et qui nous appelait au son de sa cloche - et les parties de foot dans le grand terrain autour de la maison que mes parents louaient.
Et quand on voulait rire un peu, on prenait le cabas et hop, direction le marché. Au (mauvais) son de "Méditerranéenne", terrible chanson d'Hervé Vilard que les marchands de cassettes s'obstinaient à diffuser, nous déambulions dans les allées, achetant un peu, observant beaucoup la faune locale.

Tout ça était très bon enfant. Pas très classe, mais bon enfant.

Des années plus tard, j'ai à mon tour installé mon étal, bien décidée à vendre tout mon barda sur un vide-grenier, déménagement oblige. J'y ai retrouvé ce même mélange de population, ces pros de la collection en tout genre, bouquiniste, philatéliste et autres, dégainant leurs liasses de billets à 6h du matin, au cul du camion ; ces badauds qui jettent un oeil mais qui seraient tellement mieux dans leur jardin; ces acharnés du marchandage qui voudraient qu'on leur donne l'objet convoité, avec quelques pièces, tant qu'à faire...

C'était fatigant, mais exaltant. Je me levais à 5 h du mat', et filais m'installer avant que le gros des marchands ne débarquent. Ambiance particulière de ces matins où l'intensité est déjà de mise, alors que le soleil se lève... Où l'on s'affaire à monter le stand, ranger l'étal, mettre en valeur les quelques mètres carrés qui nous sont octroyés...

J'ai remis le couvert quelques fois. A deux, trois reprises, peut-être. J'ai connu tous les temps. Il a plu, beaucoup. C'était horrible, les gens filaient en courant, rejoignant leur voiture pendant que nous, pauvres commerçants d'un jour, nous échinions à trouver une bâche de fortune pour tenter de sauver la marchandise. Quand la pluie cessait, nous constations les dégâts, un peu las, mais n'avions jamais le temps de faire sécher quoi que ce soit, les clients revenant à l'assaut au premier rayon du soleil.

Puis cela a été le cagnard. Luttant contre les coups de soleil à grands coups de spray, je tentais vainement de convaincre les égarés, en sueur, marchant péniblement, d'acheter ce si joli manteau d'hiver ou ce magnifique pull... J'étais seule derrière mon stand, à vendre. Paradoxalement, à chaque fois, j'ai ressenti cette même énergie débordante des marchands, les mêmes oeillades complices après le passage d'un client difficile, la même adrénaline quand un chaland s'arrêtait, regardait, achetait... J'aimais raconter la provenance de certains objets dont je me délestais, entamer la conversation avec la maman qui me débarrassait du stock de vêtements de mon loulou, garder le stand du voisin, le temps qu'il fasse une pause. J'aimais cette solidarité.

J'ai retrouvé aussi le même côté désuet qui habitait déjà le marché de mon enfance. C'était ça, pour moi, faire le marché. Pas du commerce au rabais, non. Une autre forme de commerce. Où l'on découvre une solidarité entre certains chalands, une rivalité pour beaucoup d'autres.

Maintenant que mon gros livre rose est prêt, je peux vraiment m'atteler à la recherche d'un local. Cela peut venir demain, cela peut venir bien plus tard. Alors, pour me lancer, vraiment, cette fois, tester mes produits, me faire connaître, pourquoi ne pas rejoindre le clan des vendeurs ambulants?

Vous m'auriez dit cela il y a quelques mois, je me serais esclaffée, avec en tête l'abominable mélodie d'Hervé Vilard. Aujourd'hui, j'ai revu mon jugement. Cet après-midi, par un heureux hasard, j'ai évoqué avec un agent immobilier la possibilité de reprendre un local que j'avais repéré. Mais je ne le vois plus comme une condition sine qua non pour me jeter à l'eau. D'autres alternatives existent.

Il est pas beau, mon poisson?

2 commentaires:

  1. Si si ! pis c'qu'est bien, c'est qu'il est pas d'avril, ça le rend plus consommable.
    J'ai un souvenir de marché : LE marché de mon chef-lieu de canton, où il y a plus de dix ans une brave dame taillée à la serpe, le cheveux gras et en sueur, dans sa blouse fleurie en nylon, braillait derrière son étal et du haut de ses 50 balais bien vécus "elle est fraîche, ma moule ! elle est fraîche !", avec le genre de voix qui va avec...
    Chais pas pourquoi, j'ai jamais su lui en acheter....!!!
    La Mouette su'l'marché ? et why not ?

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  2. C'est pas con du tout pour te lancer. Mais c'est dur car il faut y être de bonne heure. Et qui alors s'occupera de ton loulou le matin ? Enfin, je suppose que tu as réfléchi à tout ça. Donc c'est une bonne idée. Fonces.

    Bisettes
    L'oiseau

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