vendredi 5 juin 2009

Le maori est un chef d'entreprise comme les autres

En préambule, je précise que ce message n'a aucun caractère discriminatoire, que je n'ai rien contre les Maoris et je vous conseille d'ailleurs l'excellent "L'âme des guerriers" de Lee Tamahori. Je suis juste impressionnée, c'est tout. Ceci étant dit, je m'explique.

Je ne vous ai pas tout raconté, sur ma journée passée à l'AFPA, hier. J'avoue que depuis ma rencontre avec le dormeur, j'ai compris que j'aurais du mal, désormais, à ouvrir mes yeux ébahis plus grands. Oui, il y a un avant et un après dormeur.

Hier, pourtant, on a franchi un nouveau cap dans le personnage étonnant. A vrai dire, nous étions tous là à dormir, pardon, à écouter religieusement l'experte ès-impôts-juridique lorsque le bruit a retenti depuis le sud-est de la salle. Énorme. Mon voisin a sursauté, comme subitement délivré d'un cauchemar. J'ai tressailli aussi.

Ce n'était pas un bruit, mais le son d'une voix, en fait.

"On fait une pause, là."

Pas "on fait une pause, là?" Non, "on fait une pause, LA." Maintenant. C'était autoritaire et brutal et ce son, comme sorti d'une caverne, provenait bien d'une personne humaine.

Limite inconsciente, je me suis tournée vers l'objet de mes soudains tourments. Un maori, là. Il avait dû rentrer dans la salle par derrière, discrètement, ce qui, à son allure, semble pourtant impossible. Le cou de taureau, les membres épais et larges, le torse solide, la boule rasée et les lunettes-de-surfeur-qui-font-trop-trop-Brice-de-Nice négligemment posées à l'envers. Le corps dessiné par des tatouages multiples. Les tongs, permettant de constater qu'un coup de talon de sa part m'enverrait direct aux urgences.

Je me suis retournée vers mon voisin. C'était trop tard, nous étions hilares. Un rire nerveux, bien sûr.

Le monsieur voulait sortir et personne ne l'en a dissuadé. Nous avions atteint les limites du courage individuel.

Comme la pause était pour le moins brève et que l'experte n'était pas découragée -cherchant visiblement à relever le challenge de nous tenir le plus longtemps concentrés - le cours a repris et la question sur les diplômes exigés, concernant certains corps de métiers, a été abordée. Mon voisin s'était doucement assoupi, de nouveau, après avoir quémandé sa madeleine, en vain. Et là, nouveau choc.

"Alors là, ça me concerne."

Genre, tout le foin d'avant, il s'en fichait comme de son premier tatouage. L'experte ne s'est pas découragée:

"Ah oui, vous voulez vous lancer dans quoi?"

"Je veux être tatoueur"

Il m'aurait dit esthéticienne que j'aurais eu du mal à y croire mais là, tout semblait cohérent. Il n'a pas eu vraiment la réponse qu'il espérait, alors il s'est poussé contre le mur, assis sur une table, surplombant tout le groupe. A croisé ses gros biscotos. Tendance "je vous ai à l'oeil." C'était terminé, mon voisin ne pourrait plus fermer l'oeil, lui aussi était désormais aux aguets. Pas question de se prendre un nouveau coup d'adrénaline la prochaine fois.

Il était plus de midi, l'experte a juste dit:

"Voilà, c'est la fin"

Que le Maori a conclu par un vibrant:

"Enfin".

Vexant, j'imagine... Dehors, nous avons tous repris nos esprits, mes petits copains et moi, sans pouvoir retenir plus longtemps notre rire nerveux. Pourquoi imaginer qu'un créateur d'entreprise répond parfaitement à un profil-type? Le tatoueur nous a permis de balayer les derniers a-priori que l'on peut avoir - à l'insu de notre plein gré, comme diraient les Richard (drôle de coïncidence, d'ailleurs. Mais je m'égare).

Après déjeuner, je me faisais donc cette réflexion, tout en signant la feuille de présence, pensant que j'étais quand même débile de préjuger ainsi du caractère des uns et des autres et de ricaner bêtement. Quand soudain, j'ai vu une ombre et senti une présence oppressante au dessus de mon épaule. Il était là. Il s'était approché et n'était plus qu'à quelques centimètres de moi. Il avait repéré mon petit manège et il n'allait faire qu'une bouchée de ma petite personne trop moqueuse.

Sans un mot, il a tendu la main vers moi. Il voulait la feuille. Je m'en suis débarrassée comme si elle me brûlait.

Là, j'ai cru apercevoir un micro-sourire. Pas sûre, mais je n'ai pas osé lui demander quoi que ce soit. La limite du courage individuel, je vous dis.

5 commentaires:

  1. Mort de rire ! Ta note est vraiment trop drôle.

    L'oiseau

    RépondreSupprimer
  2. J'ai adoré lire ton post! et ben lui pour être intimidant !mouahahaha je veux être tatoueur...Mdr ^^
    une bisette!

    RépondreSupprimer
  3. Merci à tous les deux. Dis donc, jolie couturière, tes créations sont superbes, c'est une belle découverte!

    RépondreSupprimer
  4. Bon courage, la Mouette, là je me suis bien marrée ! pas dur : J'Y ETAIS !
    Encore ! encore !

    RépondreSupprimer
  5. Bonjour Anne,
    Tu veux dire que tu pourrais me servir de garde du corps la prochaine fois? Merci pour tes commentaires en tout cas, et bienvenue ici!

    RépondreSupprimer